L’ICANN, l’organisation sans but lucratif en charge de gérer les noms de domaine sur internet depuis 1998, vient d’annoncer qu’elle venait d’arriver à un nouvel accord avec le Ministère Américain du Commerce qui leur permettra d’opérer de façon plus indépendante.
D’autres gouvernements ainsi que des entreprises privées auront désormais leur mot à dire sur la façon dont les noms de domaine sont gérés. Le ministère du commerce US continuera d’avoir un siège au Comité Consultatif Gouvernemental, mais son influence sera désormais équivalente à celle des autres membres de l’organisation.
Pressions puis satisfecit en Europe
La Commission Européenne avait émis de vives critiques sur le contrôle fait par les Etats-Unis sur l’ICANN depuis quelques temps, la commissaire européenne chargée de la société de l’information et des médias s’est clairement montrée satisfaite de ce nouvel accord signé par l’ICANN : “Les utilisateurs d’internet de par le monde peuvent désormais anticiper les décisions de l’ICANN sur les nom de domaine et les attributions se feront de façon plus indépendantes et plus responsables, prenant ainsi les intêrets de chacun”.
http://www.dailymotion.com/videoxafzkzEn France, Nathalie Kosciusko Morizet avait clairement pris position sur le sujet, renforçant la pression exercée par l’Europe sur le gouvernement Américain : « Ce n’est pas normal que sur le sujet des nouvelles extensions, par exemple, les Américains puissent dire ‘Non’, et pas les autres pays (…) l’ICANN est sous domination américaine », « il faut évoluer vers quelque chose de plus ONUsien, un pays : une voix, correspond beaucoup mieux à la philosophie de l’internet ».
L’ICANN sera désormais gérée par “de multiples parties prenante, dirigées par le secteur privé, dont la gouvernance technologique en matière de DNS se fera à partir de la base”.
Les Etats Unis avaient jusqu’ici un contrôle assez étroit de l’ICANN, mais ce nouvel accord le rend plus souple et défait les liens entre le gouvernement américain et l’ICANN. Le précédent accord arrivait à expiration demain jeudi.
Reste l’accord entre l’IANA (Internet Assigned Numbers Authority) qui organise et surveille l’allocation d’adresse IP numériques, et le gouvernement Américain, qui lui cour encore jusqu’en 2011 et n’est pas concerné par l’accord conclu par l’ICANN aujourd’hui.
L’influence des lobbys
La politique Américaine avait souvent impacté les décisions de l’ICANN, par exemple quand cette dernière avait proposé une extension de nom de domaine en .xxx pour les site adultes en 2005, et que des lobbys ultra conservateurs comme l’American Family Association et la Family Research Council avait fait passer cette proposition à la trappe.
American Family Association, la Family Research Council, ainsi que des lobbys comme Morality In Media, prônent le filtrage des contenus sur internet : pédophilie mais aussi pornographie, ces lobbys militent également pour la criminalisation de l’homosexualité et la répression du sexe hors mariage.
Ces lobbys sont puissants aux Etats Unis et en Angleterre, et sont derrière les différentes lois de censure et de filtrage de l’internet un peu partout dans le monde, notamment en Australie, où le filtrage initialement présenté comme censé bloquer les sites pédophiles censurent en réalité la pornographie, Morality in Media tentant de démontrer que les deux sont intimement liés.
Même si l’on ne trouve pas de façon visible de traces de leur influence sur la politique Française, on ne peut que se réjouir du déclin de leur capacité à orienter les décisions d’un organe aussi fondamental dans la gouvernance de l’internet.
(photo : Vincent Cerf lors de son dernier discours à l’ICANN, CC-by de Veni Markovski)